Bonjour. Je m’appelle Aurélien BIDOT et je suis pilote d’avion. Bienvenue dans cette séquence destinée au transport aérien. Quelques ordres de grandeurs intéressants : le transport aérien transportait 2,4 milliards de passagers en 2010 et il prévoit d’en transporter 16 milliards en 2050 si on reste à une croissance de 5 % par an. Il y a actuellement un décollage par seconde dans le monde et le secteur consomme 9 000 litres de kérosène par seconde, ce qui correspond à 8 % de la consommation mondiale. Le transport aérien est responsable de 2,5 % des émissions de CO2 d’origine humaine dans le monde mais d’après le GIEC, sa contribution à l’effet de serre pourrait être deux à quatre fois plus importante. En effet, le transport aérien, par ses rejets, est un secteur qui pollue à toutes les échelles. Aux alentours des aéroports, au même titre que le transport terrestre, il pollue à la micro-échelle et à la méso-échelle alors qu’en altitude un avion influe directement la chimie atmosphérique et ainsi pollue à la macro-échelle, voire même à l’échelle du climat. Par exemple, les particules émises par les avions de ligne en altitude sont parfois responsables de très nettes condensations qui contribueraient au réchauffement climatique. Le transport aérien est le moyen de transport le plus sûr du monde et aucun retour en arrière ne sera toléré, et c’est pourquoi les pouvoirs publics ont longtemps été frileux de modifier la manière de travailler du secteur au nom du développement durable. Le premier pas a été fait par les compagnies elles-mêmes via l’IATA qui est l’Association Internationale des Transporteurs Aériens. En 2009 à Copenhague, elle a présenté un plan de réduction des émissions de CO2 qui prévoit à partir de 2020 une stabilisation des émissions de gaz à effet de serre, puis une diminution d’ici 2050 de moins 50 % par rapport au niveau enregistré en 2005. Les différents vecteurs qui permettront d’atteindre ces objectifs seront développés juste après. Le premier vecteur, ce sont des avions de plus en plus performants. Je vais donner un exemple. Le Boeing 777-300ER des années 2000 consomme à peu près 30 % de moins que son homologue des années 70, le Boeing 747-200. Et l’évolution technologique dans le domaine ne semble pas ralentir. Le deuxième vecteur, c’est l’optimisation des trajectoires. Je vais donner deux exemples qui illustrent les évolutions faites et encore à faire dans ce domaine. Le premier exemple concerne les approches qu’on appelle CDFA, cela veut Continuous Descent Final Approach. La méthode consiste à lisser tous les paliers qui existent de la croisière jusqu’à l’atterrissage. Il faut savoir qu’un avion à palier consomme deux à trois fois plus de carburant qu’un avion en descente. Cette méthode a pu être mise en place grâce aux outils qui sont disponibles dans les cockpits, à la disposition des pilotes. Le deuxième exemple concerne la gestion des attentes et la séparation des avions par le contrôle aérien. Alors avant, les avions attendaient leur tour à l’atterrissage comme illustré ici en faisant des ronds en descente. Maintenant, de plus en plus, les contrôleurs aériens séparent les avions en trajectoire à vitesse constante mais en leur donnant des caps différents comme illustré ici. Ceci est possible grâce aux outils de plus en plus performants à la disposition des contrôleurs aériens. L’avenir de la séparation néanmoins sera une séparation à vitesse variable. Les avions resteront sur la même trajectoire, la plus courte, mais seront séparés en vitesse. Ceci est déjà possible dans les espaces aériens peu fréquentés mais devient vite problématique pour le contrôleur lorsque le trafic se densifie. Parlons maintenant du biocarburant qui est le troisième vecteur. Les coûts de fabrication de recherche et de développement d’un avion long courrier sont environ de 5 milliards de dollars et il va parcourir le monde pendant 40 ans. Si l’envie prenait un constructeur de prendre le pari de construire un avion adapté au biocarburant, il faudrait qu’il s’assure que le biocarburant en question soit disponible dans tous les aéroports desservis par l’avion. Ce choix n’a pas été fait par les constructeurs. La communauté aéronautique s’oriente plutôt vers le développement d’un biocarburant de type drop-in. Drop-in, cela veut dire que le biocarburant en question doit être indiscernable du kérosène et qu’il puisse se mélanger à ce dernier en proportion variée sur n’importe quel type d’avion. Le domaine routier un peu en avance sur la question, a déjà développé des biocarburants mais ceux-ci ne conviennent pas pour l’aérien dû à leurs propriétés thermophysiques. La recherche aéronautique s’oriente donc vers les biocarburants de seconde génération basés sur les plantes suivantes : le jatropha, la cameline, le carenche ou encore la salicorne. Ces plantes concurrencent relativement peu l’alimentaire puisqu’elles poussent naturellement dans des milieux très peu fertiles. Des vols ont déjà eu lieu en vol d’essai, ou commercial, et les mélanges vont jusqu’à 50 % de biocarburant. Aucun problème n’est constaté par les pilotes et de légers effets notables comme un gain, une réduction de la consommation de l’ordre de 2 % et une tenue à froid augmentée à – 60° et une réduction significative des émissions de particules. Le quatrième et dernier vecteur concerne les mesures économiques. Cela veut dire finalement une fiscalité adaptée au transport aérien, bien évidemment non voulue des compagnies aériennes, c’est pourquoi le trait rouge n’en tient pas compte. Néanmoins depuis 2012, l’Union européenne a décidé l’intégration du secteur du transport aérien au sein du système communautaire d’échange de quota d’émission. Pour conclure, afin de respecter les engagements ambitieux définis par IATA, il va falloir développer des avions de plus en plus performants, de continuer la recherche en aéronautique, continuer d’affiner les trajectoires des avions sans renier sur la sécurité, développer des biocarburants compatibles, et enfin adapter la fiscalité entre autres du kérosène et ceci au niveau mondial afin d’éviter les distorsions de concurrence. Merci de votre attention.